21/05/2012 Stéphane Tessier : « Ethnicity and health research » A propos d’un article de santé publique.
Ghazala Mir1, Sarah Salway2, Joe Kai3, Saffron Karlsen4, Raj Bhopal5, George TH Ellison6, Aziz Sheikh5 : Principles for research on ethnicity and health : the Leeds Consensus Statement, European Journal of Public Health, 1–7, 2/05/2012 (en ligne)
Depuis de nombreuses années la question de la pertinence d’étudier l’ethnicité en santé publique est posée. Cet article semble vouloir le démontrer par la force du consensus, publié par un groupe de recherche éponyme, dont justement l’objectif est de montrer cette pertinence. Suivant la méthode Delphi regroupant quelques experts, auteurs ont défini ce qu’ils nomment « le consensus de Leeds ». Sur 32 propositions, 11 recueillent l’assentiment des experts, qui en dégagent 10 principes devant guider la recherche en la matière. La première ainsi affirme « l’ethnicité est souvent associée avec handicap et mauvaise santé. En conséquence, les chercheurs ont à la fois une responsabilité professionnelle et éthique pour inclure l’ethnicité dans leurs travaux et leurs recommandations. »
La seconde, plus raisonnable dans sa deuxième partie stipule ainsi que « les chercheurs doivent être vigilants sur les dangers encourus d’alimenter des idées et comportements discriminatoires et se garder contre de potentiels effets négatifs résultant de leurs recherches. »
La quatrième touche du doigt le cœur du débat : « Il y a besoin de rechercher et d’évaluer, lorsque c’est adapté, la diversité au sein même des ethnies et d’éviter l’homogénéisation. […] Les recherches sur les inégalités ethniques de santé doivent donner toute leur place aux façons dont l’ethnicité croise les autres formes de différence pour comprendre comment et pourquoi cela peut être pertinent. »
Enfin, la huitième semble quelque peu affaiblir, si ce n’est disqualifier le processus : « L’analyse des inégalités de santé doit considérer le contexte social dans lequel les différences ethniques en termes de résultats et de comportements de santé apparaissent. »
Lorsqu’on voit ce que recouvre le terme « ethnique » en anglais, au travers de l’analyse très détaillée comparant les résultats des recensements britanniques de 1991 et 2001 (avec nos commentaires et soulignements) entre lesquels les définitions ont bougé, on voit mal comment mobiliser cette notion en termes statistiques. Dans ce document en effet, il est souligné que l’ethnicité est auto déclarée, avec même, dans le cadre d’une étude où les personnes ont pu être tracées d’un recensement à l’autre, des passages non négligeables (12%) de Noir à Blanc. Dans cette perspective, il est donc question de l’appartenance ressentie qui n’a rien à voir avec un quelconque patrimoine génétique, même si les irlandais sont tous roux et les anglais roulent à gauche ! En quoi la notion d’appartenance ressentie peut-elle devenir un déterminant de la santé ? Si ce n’est dans les interactions qu’elle entretient avec l’environnement social et familial et de ce fait, reproduisant la tautologie de la première recommandation, on boucle sur les questions de discriminations, de relégations, de « plafond de verre », partagées par toutes les populations « écartées », au-delà des couleurs de peau. Vouloir mettre en avant cette dernière comme source de mauvaise santé ne peux qu’accroître la stigmatisation.
Non, décidément, ce « consensus » n’est pas de nature à nous convaincre !
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